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  • Photo du rédacteurLoïc Morel

Bitcoin et l'écologie.

Le réchauffement climatique est un fléau qui préoccupe de plus en plus de personnes dans le monde. Comme avec beaucoup d'autres sujets de société, notre environnement social nous pousse à juger certains biens, certains secteurs, certaines actions ou certaines idées, et à les mettre dans une case : soit la case du "bien", soit la case du "mal".




En réalité, lorsque l'on entre dans le détail de ces sujets et que l'on essaie de prendre de la hauteur, aucune des parties n'est fondamentalement bien ou fondamentalement mal. Il y a plutôt un curseur à placer en fonction des avantages et des inconvénients. Si l'on zoom sur le sujet de l'écologie, de nombreux biens sont en effet mis d'office dans la case du "bien pour la planète" ou du "mal pour la planète". Par exemple, les voitures électriques ou les éoliennes sont souvent mises dans la case du "bien pour la planète". Pourtant, lorsque l'on regarde plus en détail leurs impacts, on se rend compte qu'il faut nuancer ce propos, et que ce ne sont pas forcément les meilleures solutions pour enrayer le réchauffement climatique.


Par bienséance, Bitcoin est quant à lui souvent mis d'office dans la case du "mauvais pour la planète". Dans cet article je vais essayer de nuancer ce propos et d'étudier dans le détail ce qu'il en est vraiment. Vous allez découvrir que Bitcoin a peut-être plus d'atouts que vous ne le pensez pour faire face au réchauffement climatique.




Les reproches faits à Bitcoin.


Ce qui est avancé par les personnes qui critiquent Bitcoin pour son impact sur l'environnement est qu'il consomme beaucoup d'électricité.


En effet, il est tout à fait vrai que le réseau Bitcoin utilise entre 100 TWh et 200 TWh par an.


Cette électricité est utilisée par ceux que l'on appelle les mineurs. Ce sont des ordinateurs qui s'adonnent au mécanisme de Proof-of-Work (preuve de travail).


Le réseau Bitcoin étant distribué et acéphale, il faut que tous les ordinateurs qui y travaillent puissent se synchroniser et faire face aux éventuelles attaques d'acteurs centralisés, sans introduire de point de défaillance unique sur le réseau. C'est ce que permet la preuve de travail.


Techniquement, la preuve de travail consiste à réaliser un bloc avec les transactions des utilisateurs en attente de confirmation. Pour qu'un bloc soit validé, et accepté unanimement par les nœuds du réseaux, et donc par les utilisateurs, le hash de son entête doit être numériquement inférieur au facteur de difficulté du réseau. Pour trouver un hash valide, et empocher la récompense associée et les frais des transactions incluses, chaque mineur doit essayer de nombreuses combinaisons par tâtonnement.


J'en parle plus en détails dans cet article : Qu'est-ce que le minage de bitcoins ?


Cette recherche par tâtonnement va nécessiter d'utiliser des ordinateurs puissants, qui utilisent beaucoup d'électricité. C'est de là que vient la consommation électrique de Bitcoin.


Mais alors, pourquoi devons nous absolument faire cette recherche par tâtonnement qui semble pourtant bête et inutile ?




Pourquoi la Proof-of-Work ?


Le mécanisme de preuve de travail, avec ses calculs par tâtonnements, représente la pierre angulaire de Bitcoin. Sans ce mécanisme, le réseau devient la proie d'attaques en tout genre.


Cette nécessaire consommation d'électricité, induite naturellement par le tâtonnement, permet de mettre des limites physiques aux attaques sur Bitcoin, et permet d'utiliser la théorie des jeux. Un attaquant qui voudrait faire tomber Bitcoin, que ce soit une personne malhonnête ou un état dictatorial, devra réunir plus de puissance de calcul et donc consommer plus d'électricité que tous les acteurs honnêtes du réseau. Les ressources en électricités n'étant pas infinies, cela permet de protéger physiquement le réseau distribué Bitcoin. Ainsi, n'importe quel acteur a naturellement plus à gagner en essayant d'aider le réseau qu'en essayant de l'attaquer.


Cette consommation du réseau Bitcoin n'est donc pas le fruit d'un manque de connaissances technologiques, comme certains voudraient le faire croire, mais bien le seul moyen actuel pour protéger physiquement le réseau Bitcoin. C'est en quelque sorte l'ancrage du numérique sur le monde physique.


Alors oui, d'autres réseaux de crypto-monnaies utilisent d'autres mécanismes de sécurisation. Tous ces autres mécanismes de sécurisation peuvent fonctionner partiellement sur le court terme, mais ils ont tellement de lacunes techniques qu'ils ne pourront pas fonctionner sur le long terme.


Par exemple, la Proof-of-Stake n'a aucun ancrage physique dans le monde réel. Un réseau sécurisé par ce mécanisme serait donc extrêmement plus facile à attaquer. De plus, la théorie des jeux présente sur Bitcoin ne se retrouve pas dans ce type de sécurisation de réseau.


En plus de ces défaillances techniques, les autres mécanismes de sécurisation mènent mécaniquement à une centralisation du réseau qui les utilise. Par exemple, le fait d'utiliser la Proof-of-Stake mène les utilisateurs à se tourner vers des solutions centralisées de cloud pour faire tourner leurs nœuds. Cette centralisation mène à des risques de régulation, de censure, voire de suppression de la part d'États dictatoriaux ou d'entreprises privées.


On peut également critiquer ces mécanismes pour leur Effet Cantillon lors de la distribution des récompenses.


Finalement, on se rend compte que la Proof-of-Work (preuve de travail) utilisée sur Bitcoin est la seule solution pour avoir un réseau à la fois parfaitement distribué et parfaitement sécurisé. Distribution et sécurisation sont indispensables pour mettre en place un système d'échange de valeur libre, égalitaire pour chaque utilisateurs et résistant à la censure sur le très long terme.




Cette consommation est-elle justifiée ?


Il faut bien comprendre que toute action humaine nécessite l'utilisation d'énergies. Ainsi, de nombreuses industries sont très polluantes, mais elles ne seront jamais supprimées puisqu'elles représentent des piliers indispensables dans notre vie.


Prenons par exemple le cas de l'hôpital. Ce lieu consomme beaucoup d'énergies que ce soit pour la fabrication des machines médicales, la construction du bâtiment, le fonctionnement des services, le déplacement des ambulances... Pourtant, personne ne vient demander la fermeture de tous les hôpitaux de France pour leur consommation énergétique sous couvert de l'écologie, puisqu'ils sont utiles à la vie humaine.


Nous devons donc nous demander si Bitcoin est assez utile à la vie humaine pour justifier une telle consommation électrique. Selon moi, Bitcoin est bien plus utile que de nombreuses autres industries qui consomment pourtant bien plus d'énergie que lui.


Bitcoin permet à tout le monde d'accéder facilement à un réseau monétaire d'échange de valeur de pair à pair. Ce réseau est complètement distribué et sécurisé. Il permet à quiconque de jouir d'une monnaie libre, égalitaire et incensurable, tout en protégeant facilement son épargne face à l'inflation.


La monnaie est la base de toute société humaine. Elle représente un instrument de liberté lorsqu'elle appartient au peuple, et un instrument de contrôle et de répression lorsqu'elle est gérée par un État. Bitcoin est le premier réseau à pouvoir enlever le pouvoir monétaire aux états et à le rendre aux utilisateurs, de façon totalement pacifique. C'est également le seul à pouvoir résister à toute attaque étatique et interdictions administratives, grâce notamment à sa consommation électrique.


Evidemment, tous ces avantages peuvent nous paraître quelques peu futiles en France, puisque que la majorité de la population a accès à des services bancaires, puisque nous avons une monnaie à peu près stable (quoi que, 4% d'inflation en 2021 selon Eurostat ce n'est pas rien) et puisque très peu de transactions sont censurées. Mais le monde, ce n'est pas la France. Lorsque les populations du Venezuela, de l'Argentine, de la Turquie ou encore du Brésil sont confrontées à des taux d'inflation à deux chiffres, ils sont contents d'avoir une alternative sur une monnaie dure et libre. Lorsqu'en Afrique seulement 10% de la population est bancarisée, alors que 50% des africains ont accès à internet, ils sont content de pouvoir utiliser Bitcoin. Lorsque des manifestants pacifiques voient se faire bloquer leurs comptes bancaires à cause de leurs idées au Canada, ils sont contents de pouvoir utiliser Bitcoin pour survivre...


Pour comprendre l'utilité de Bitcoin, et donc accepter sa consommation électrique, il faut essayer de prendre de la hauteur afin de voir comment il peut apporter des solutions à de nombreux maux de nos sociétés.


Citation de Friedrich Hayek, prix Nobel d'économie en 1974 : "L'argent est un des plus magnifiques instruments de liberté que l'homme ait jamais inventé."




Et puis finalement, cela représente quoi 100 TWh par an ?


Et bien pour vous donner une image, l'industrie bancaire consomme à elle seule 6 fois plus que Bitcoin. En sachant que l'industrie bancaire seule ne sert rien, pour qu'elle fonctionne il faut ajouter les réseaux de transaction comme Visa ou Mastercard qui disposent de nombreux serveurs. Il faut également ajouter la production de cash et les déplacements des employés du secteur bancaire... Tout ce complexe agglomérat peut être remplacé par Bitcoin à lui tout seul.


Pour vous donner un autre exemple, Bitcoin consomme moins d'électricité que la seule utilisation des sèche-linges aux Etats-Unis. L'utilité de Bitcoin semble pourtant être bien supérieure à celle du sèche-linge.


Non seulement Bitcoin consomme moins que les systèmes financiers actuels pour un service plus qualitatif, mais il peut également être un atout dans la lutte contre le réchauffement climatique. Pour cela, nous allons étudier séparément le réseau Bitcoin et son unité de compte native.




Le réseau Bitcoin est-il écolo ?


Tout d'abord, rappelons que le réseau Bitcoin est nativement neutre en termes de pollution. En effet, il ne rejette aucun gaz à effet de serre. En revanche, il consomme de l'électricité. Donc si l'on veut un Bitcoin totalement vert, comme pour le reste des industries, il faudra modifier nos structures de production électrique afin de les rendre plus écologiques.


Ensuite, il est important de clarifier un point que de nombreuses personnes n'ont pas compris : il n'existe aucun lien direct entre le nombre de transactions sur le réseau Bitcoin et la consommation électrique. Ce n'est pas parce qu'il y a plus de transactions sur Bitcoin que la consommation électrique augmente, c'est techniquement faux de dire le contraire. Pour comprendre ce point plus en détail, je vous recommande de consulter cet article : Qu'est-ce que le minage de bitcoins ?


Cela est d'autant plus vrai depuis l'arrivée du réseau Lightning Network, surcouche du réseau Bitcoin qui permet théoriquement de réaliser des millions de transactions à la seconde en bitcoins, avec une consommation électrique négligeable.


éclair


Après avoir compris ces précisions, nous pouvons étudier l'impact écologique de Bitcoin.


Aujourd'hui, l'industrie du minage de Bitcoin est le secteur qui est le plus avancé au monde dans la transition écologique. En effet, déjà plus de 60% du parc total utilise de l'électricité verte pour sa production.


Si les mineurs sont des bons élèves de l'écologie, ce n'est pas parce qu'ils sont militants écolo, mais plutôt car il est de moins en moins profitable pour eux d'utiliser des sources d'électricité sales. En effet, le principal poste de coûts d'un mineur est l'achat d'électricité. C'est donc le prix de l'électricité qui va déterminer si son activité est profitable ou si elle est en pertes. Les mineurs sont donc constamment à la recherche de sources d'électricité bon marché. Aujourd'hui ces sources d'électricité peu chères se trouvent sur les surplus non consommés que personne ne veut.


En effet, nous ne savons actuellement pas stocker l'électricité. Lorsque celle-ci est produite, elle doit être consommée directement, sinon elle est perdue. Les productions électriques à partir d'énergie fossile sont pilotables, elles ne produisent donc en principe pas de surplus. Les productions renouvelables ne sont en revanche pas pilotables, elles produisent donc de l'électricité de manière assez aléatoire en fonction des conditions météorologiques. Tous ces barrages, tous ces panneaux solaires et toutes ces éoliennes ne peuvent pas adapter leur production à la demande, et produisent donc des surplus d'électricité. Ce surplus représente non seulement un gaspillage énergétique énorme dans certains pays, mais il empêche également souvent la mise en place de nouveaux projets de production d'énergies renouvelables à cause de leur trop faible rentabilité financière.


Les mineurs, une industrie ultra mobile attirée par ces productions gaspillées à bas coût, permettent à tous ces projets d'énergies renouvelables de rentabiliser le moindre watt produit. En conséquence, Bitcoin permet directement l'émergence de nouveaux projets de production d'énergies renouvelables, qui n'auraient pas pu se faire sans cette solution.


Donc si l'on résume, Bitcoin utilise majoritairement de l'électricité verte qui allait être gaspillée. Il représente même actuellement la seule solution pour assurer la rentabilité d'un projet de production d'électricité renouvelable.


À l'opposé, les mineurs qui utilisent encore des énergies sales sont de moins en moins nombreux au fil du temps. En effet, le marché libre fera que les mineurs les plus rentables, c'est-à-dire ceux qui minent à partir de surplus vert, entraîneront les mineurs sales qui payent leur électricité au prix fort vers la faillite.



Un autre domaine écologique ou Bitcoin est très utile, c'est pour le torchage (flaring). L'exploitation du pétrole nécessite l'utilisation de gaz. Ce gaz, une fois utilisé pour l'extraction, est brûlé par les torchères afin de s'en débarrasser. Les gaz à effet de serre qui résultent de cette combustion représentent 1% de l'émission totale de polluants dans le monde, ce qui est énorme. En plus de la pollution engendrée, cette combustion représente un énorme gaspillage d'énergie.


Mais alors pourquoi les extracteurs brûlent-ils ce gaz ?


Car les puits de pétrole sont souvent très isolés des infrastructures gazières et électriques. Qu'ils soient en mer ou sur des terres reculées, ce n'est pas rentable pour eux de mettre en place cette infrastructure pour valoriser leurs déchets. Ils préfèrent donc s'en débarrasser directement sur place.




Bitcoin leur apporte une solution concrète à la fois écologique et rentable. Ils peuvent maintenant utiliser le déchet gazier pour produire de l'électricité directement sur-place et utiliser cette électricité pour miner du bitcoin. Les mineurs de Bitcoin n'ont pas besoin de grosses infrastructures, ils ont simplement besoin d'une source d'électricité et d'une connexion au réseau. Cette connexion réseau est assurée par des satellites dans le cas des torchères isolées.


Grâce à Bitcoin, non seulement les producteurs peuvent valoriser de façon utile l'énergie auparavant gaspillée, mais cela permet également de limiter l'émission de gaz à effet de serre.



Eninf, un autre domaine dans lequel le minage de bitcoins est intéressant pour l'écologie, c'est pour la production de chaleur. Les ASICs, ordinateurs spécialisés utilisés pour miner du bitcoin, disposent de la même efficacité thermique qu'une résistance classique. C'est-à-dire que pour la même quantité d'électricité utilisée, un chauffage classique et une ASIC produisent la même chaleur. L'ASIC, en parallèle de cette production de chaleur, permet évidemment de miner du bitcoin.


On peut donc imaginer tout un tas d'applications qui permettraient aux ménages de réduire leur facture d'électricité. Par exemple, la société française Wise Mining produit des chaudières qui, en plus de chauffer votre maison et votre eau, minent du bitcoin pour vous.



Le minage de Bitcoin représente donc la pièce qu'il nous manquait pour pouvoir réaliser des circuits vertueux autour de la production et de la consommation d'électricité.




La monnaie bitcoin est-elle écolo ?


Au-delà du réseau en lui-même, nous pouvons nous demander quelles seraient les conséquences sur l'environnement de la mise en place d'un standard monétaire bitcoin.


L'émission de l'actif bitcoin est strictement limitée à 21 millions d'unités. C'est ce que l'on appelle "une monnaie dure". L'utilisation massive de bitcoin comme monnaie dans l'économie mènerait mécaniquement à une déflation des prix sur les biens et les services. Cela permettrait naturellement de donner un gros coup de frein à la consommation de masse de nos sociétés qui représente un réel problème environnemental.


La mise en place d'un standard bitcoin permettrait un changement brutal de paradigme. Ce serait une solution bien plus efficace et bien plus naturelle que l'écologie punitive sous forme de mesurettes inefficaces.


Concrètement, si la valeur de la monnaie est rétablie, le consommateur réfléchira deux fois à son besoin avant de l'assouvir. Il préfèrera aussi souvent investir dans des biens locaux plus qualitatifs qui lui serviront plus longtemps.


Ce sentiment est très fort chez les bitcoiners pour qui, chaque consommation nécessite une réelle réflexion avant de passer à l'acte d'achat. Cet état d'esprit est naturellement impossible pour les personnes qui utilisent les monnaies fondantes étatiques.




De plus, si l'on dézoome un petit peu, on se rend compte que l'utilisation d'une monnaie non étatique comme le bitcoin mettrait fin aux grands sauvetages des entreprises zombies. Selon Joseph Schumpeter, et sa théorie de la destruction créatrice, les faillites permettraient d'augmenter l'apparition de nouvelles innovations. Innovations dont nous avons terriblement besoin aujourd'hui pour faire face au réchauffement climatique.




Conclusion.


Non, Bitcoin ne fait pas bouillir les océans. Au contraire, il pourrait représenter une réelle solution systémique pour faire face efficacement aux enjeux climatiques actuels.


En effet, Bitcoin est un atout indéniable dans notre transition écologique. Son réseau permet un développement naturel des secteurs verts en apportant une solution au problème de stockage de l'électricité. Son unité de compte, le bitcoin, pourrait permettre de changer les comportements des consommateurs en les rendant plus responsables. En même temps, le bitcoin en tant que monnaie pourrait permettre l'émergence d'une réelle économie capitaliste libérale, seul modèle économique qui permet l'apparition naturelle des grandes innovations dont nous avons besoin aujourd'hui pour faire face au changement climatique.


Au-delà de ces caractéristiques, la consommation électrique de Bitcoin ne sera jamais une consommation utile tant que l'on aura pas compris l'utilité de Bitcoin en lui-même. Pour comprendre cette utilité, il faut à la fois avoir un regard ouvert sur les problèmes des populations à l'étranger, et en même temps comprendre les mécanismes qui interviennent dans le protocole. C'est un exercice qui demande un certain effort, mais croyez-moi, cela en vaut la peine.




Pour aller plus loin :




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